L’atmosphère du sentiment

02 juin 2022   •  
Écrit par Anaïs Viand
L’atmosphère du sentiment

Dans Nowhere Near, la photographe russe Alisa Martynova retrace le quotidien de migrants. Très loin du confort d’un environnement paisible, ses sujets semblent esseulés dans des paysages incertains dont les nuances traduisent l’urgence et l’effroi. Cet article est à retrouver dans notre dernier numéro.

Terreur, détermination, vulnérabilité, confiance, perte de contrôle, désespoir, trahison. Ces mots contradictoires décrivent ce que vivent hommes, femmes et enfants en quête d’une vie meilleure. Ils sont plus de 280 millions de personnes en 2020 selon l’Organisation internationale pour les migrations. « Ces dernières années, les images de migrants ont été largement exposées dans les médias, si bien que le public s’habitue à les voir et ne développe plus aucune réaction émotionnelle à leur égard », annonce Alisa Martynova, autrice russe, née en 1994, venue étudier le 8e art à la Fondation Studio Marangoni, à Florence. La jeune femme a donc choisi de travailler autour de la représentation des sentiments. Passionnée de poésie, elle développe un langage fait de symboles et de métaphores. « Je cherche à concevoir des mondes parallèles. La réalité est effrayante, je préfère proposer une traduction. Ma méthode de création est similaire aux quatre phases du processus poétique identifiées par le poète romantique anglais William Wordsworth : observation, mémoire, filtrage et composition », ajoute-t-elle. Pour son projet Nowhere Near, amorcé en 2016, elle a croisé la parole de psychologues à celle de migrants. « Certain·es rejettent leur culture d’origine en arrivant en Italie, préférant s’adapter aux nouveaux modes de vie. Et puis il y a celles et ceux qui chérissent leur histoire, leur origine et leur culture, et qui sont prêt·es à partager leurs traditions. »

Mirages ou rêves ? Nowhere Near, c’est aussi un non-lieu sombre, mais pourtant chaleureux. Nowhere Near, ce sont des paysages directement inspirés des visions de celles et ceux qui ont accepté de lui raconter leur histoire. Il y a par exemple Mahamadou, un étudiant engagé politiquement – moitié sénégalais, moitié gambien –, qui a pris la route pour fuir les persécutions politiques. Ou encore Clayton qui, une fois arrivé en Italie, s’est découvert une passion pour les danses traditionnelles africaines – il a depuis ouvert une école avec l’envie d’apprendre à bouger son corps. Le tout composant ce qu’Alisa Martynova aime appeler « l’atmosphère du sentiment humain », un clin d’œil à un autre poète romantique anglais, Percy Bysshe Shelley. Que ses modèles viennent du Nigeria, de Gambie ou de la Côte d’Ivoire, toutes et tous constituent des étoiles, parsemées ici et là, tentant de se frayer un chemin vers des galaxies plus lumineuses.

Un projet exposé au festival La Gacilly, à partir du 1er juin, dans le cadre du Prix Nouvelles Écritures.

Cet article est à retrouver dans Fisheye #53, disponible ici

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova© Alisa Martynova

 

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova

© Alisa Martynova

 

© Alisa Martynova

Explorez
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
© Carolle Bénitah
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les femmes s'exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
© Alessandra Meniconzi, Mongolia / Courtesy of Les femmes s'exposent
Les femmes s’exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
Le festival Les femmes s'exposent réinstalle ses quartiers dans la ville normande Houlgate le temps d'un été, soit du 7 juin au 1er...
24 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Dans l’œil de Kin Coedel : l'effet de la mondialisation sur les regards
© Kin Coedel
Dans l’œil de Kin Coedel : l’effet de la mondialisation sur les regards
Aujourd’hui, plongée dans l’œil de Kin Coedel, à l’origine de la série Dyal Thak. Dans ce projet poétique, dont nous vous parlions déjà...
22 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
© Hugo Mapelli
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
Parmi les thématiques abordées sur les pages de notre site comme dans celles de notre magazine se trouve la mode. Par l’intermédiaire de...
17 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
© Carolle Bénitah
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Elie Monferier : le filon au bout de l’échec
© Elie Monferier
Elie Monferier : le filon au bout de l’échec
Imaginé durant une résidence de territoire au cœur du Couserans, en Ariège, Journal des mines, autoédité par Elie Monferier, s’impose...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les femmes s'exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
© Alessandra Meniconzi, Mongolia / Courtesy of Les femmes s'exposent
Les femmes s’exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
Le festival Les femmes s'exposent réinstalle ses quartiers dans la ville normande Houlgate le temps d'un été, soit du 7 juin au 1er...
24 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Flashs et paysages : les mondes mystiques d'lnka&Niclas
Family Portrait © Inka&Niclas
Flashs et paysages : les mondes mystiques d'lnka&Niclas
Des vagues et des palmiers rose-orangé, des silhouettes incandescentes, des flashs de lumières surnaturels dans des paysages grandioses....
24 avril 2024   •  
Écrit par Agathe Kalfas