Kerouac, l’ami armoricain

31 mars 2017   •  
Écrit par Eric Karsenty
Kerouac, l'ami armoricain

Le nom de Kerouac a pour origine le lieu-dit de Kervoac, près de Lanmeur, sur la côte nord du Finistère. C’est d’ailleurs en voyant ce nom sur un livre dans une librairie du Village, à New York, à la fin des années 1950, que Youenn Gwernig, poète breton venu chercher du travail de l’autre côté de l’Atlantique, achètera la première édition de Sur la route. Une nostalgie tenace pour cet écrivain venu s’exiler aux États-Unis, qui n’hésite pas, les soirs de blues, à prendre sa cornemuse et à grimper sur la terrasse de son immeuble, dans le Bronx, pour entonner des complaintes mélancoliques.

Racines bretonnes

Le mal du pays, c’est aussi ce qui étreint l’écrivain mythique de la Beat Generation à la fin de sa vie quand Youenn Gwernig le contacte suite à la lecture de Satori à Paris, en 1966. Dans ce roman, Kerouac raconte la quête de ses racines bretonnes lors d’un séjour en France, et cette découverte encourage Youenn à lui écrire. « Je suis le plus grand poète breton vivant : 1,92 m, et je n’écris pour ainsi dire qu’en breton, mais il m’arrive d’écrire de temps en temps en français pour me divertir.

Comme tout Breton, j’ai une petite faiblesse pour les alcools forts (quelque chose qui gratte quand ça descend), et je me demande ce que je fiche dans ce foutu bordel new-yorkais ! Voilà pour les présentations. Si nous prenions quelques verres ensemble lors de votre prochain passage à New York ? »

Fisheye Magazine | Kerouac, l'ami armoricain
© René Tanguy
Fisheye Magazine | Kerouac, l'ami armoricain
© René Tanguy

S’en suivra une amitié de trois ans, de 1966 à 1969, faite de rencontres, de cuites mémorables, de lettres passionnées et de cartes postales, de discussions et de projets inaboutis, comme celui d’un livre écrit à deux et surtout celui d’un voyage en Bretagne à faire ensemble. Une virée longtemps fantasmée pour sceller leur complicité.

« Tu me manques vraiment. Je crois que tu es le seul homme que je connaisse aujourd’hui dont la conversation et la présence sont un cadeau », confessait Kerouac en 1967. À sa mort, en 1969, l’écrivain américain avait encore en poche son billet d’avion pour la France…

De Sur la route aux Américains

Mais au-delà des romans qui ont marqué leur époque et influencé toute une génération, le nom de Kerouac est aussi attaché à l’histoire de la photographie, car c’est bien lui qui signe la préface des Américains, le livre édité par Delpire qui révéla Robert Frank au monde entier. Publié en 1958, cet ouvrage suit de six mois la sortie de Sur la route édité en 1957 !

« Les livres de Kerouac, la musique et les films de cette époque : Easy Rider (1969), Woodstock (1970)… toute cette Amérique de la contre-culture ont forgé mon adolescence », explique René Tanguy.

En 1994, le photographe croisera même la route de Robert Frank lors de l’unique stage que l’Américain a donné en France, à Clarensac, dans le Gard. Alors quand René Tanguy fait la connaissance de Youenn Gwernig, en 1999, et que le poète breton lui révèle sa complicité avec l’auteur fétiche de la Beat Generation, le photographe comprend que cette histoire le regarde. Il se lance dans une aventure qui va le conduire, six ans durant, sur la dernière route de Kerouac…

Fisheye Magazine | Kerouac, l'ami armoricain
© René Tanguy
Fisheye Magazine | Kerouac, l'ami armoricain
© René Tanguy

L’intégralité de cet article est à retrouver dans Fisheye #23, en kiosque depuis le 10 mars et disponible sur

Relay.com

Explorez
Hailun Ma, pour l'amour du Xinjiang
© Hailun Ma, Kashi Youth (2023) / Courtesy of the artist, Gaotai Gallery and PHOTOFAIRS Shanghai (25-28 avril, Shanghai Exhibition Centre)
Hailun Ma, pour l’amour du Xinjiang
Que savons-nous de la vie des jeunes de la province du Xinjiang, en Chine ? Probablement pas grand-chose. C’est justement dans une...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Milena Ill
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
© Carolle Bénitah
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les...
25 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Les femmes s'exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
© Alessandra Meniconzi, Mongolia / Courtesy of Les femmes s'exposent
Les femmes s’exposent à Houlgate pour une nouvelle édition !
Le festival Les femmes s'exposent réinstalle ses quartiers dans la ville normande Houlgate le temps d'un été, soit du 7 juin au 1er...
24 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Dans l’œil de Kin Coedel : l'effet de la mondialisation sur les regards
© Kin Coedel
Dans l’œil de Kin Coedel : l’effet de la mondialisation sur les regards
Aujourd’hui, plongée dans l’œil de Kin Coedel, à l’origine de la série Dyal Thak. Dans ce projet poétique, dont nous vous parlions déjà...
22 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Instax mini 99 : les couleurs instantanées d’Aliocha Boi et Christopher Barraja 
© Christopher Barraja
Instax mini 99 : les couleurs instantanées d’Aliocha Boi et Christopher Barraja 
La photographie analogique ne cesse de séduire un large public. Pour Fujifilm, Aliocha Boi et Christopher Barraja s’emparent de l’Instax...
Il y a 2 heures   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Isabelle Vaillant : récits d’une construction intime
© Isabelle Vaillant
Isabelle Vaillant : récits d’une construction intime
Jusqu’au 19 mai 2024, la photographe Isabelle Vaillant investit L’Enfant Sauvage, à Bruxelles, en proposant une exposition rétrospective....
Il y a 6 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
Hailun Ma, pour l'amour du Xinjiang
© Hailun Ma, Kashi Youth (2023) / Courtesy of the artist, Gaotai Gallery and PHOTOFAIRS Shanghai (25-28 avril, Shanghai Exhibition Centre)
Hailun Ma, pour l’amour du Xinjiang
Que savons-nous de la vie des jeunes de la province du Xinjiang, en Chine ? Probablement pas grand-chose. C’est justement dans une...
Il y a 10 heures   •  
Écrit par Milena Ill
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
© Carolle Bénitah
Quand les photographes utilisent la broderie pour recomposer le passé
Les photographes publié·es sur Fisheye ne cessent de raconter, par le biais des images, les préoccupations de notre époque. Parmi les...
25 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet