Récit d’un drame familial

17 janvier 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Récit d’un drame familial

Avec How far is a lightyear? l’Autrichien Simon Lehner signe une série splendide mêlant photos, archives et 3D, pour s’immiscer dans l’imaginaire d’un jeune garçon en pleine évolution.

 « J’ai suivi mon premier cours de photographie au lycée, lorsque j’avais 14 ans. Le professeur avait démarré sa leçon en expliquant ce que le 8e art pouvait devenir si on ne lui fixait pas de limite. J’ai su dès le début du discours qu’il s’agissait un médium fait pour moi »,

se souvient Simon Lehner. Cet artiste de 23 ans, installé à Vienne expérimente, depuis, avec l’image – en mêlant photographie, peinture, archives et même images 3D. « Mon travail est souvent autobiographique. Il me permet d’explorer les dimensions psychologiques, sensorielles et motrices de mes émotions », ajoute-t-il.

How far is a lightyear?, projet sélectionné pour la Carte blanche étudiants de Paris Photo en 2018, documente le développement d’un enfant au sein d’une famille sans figure paternelle. « J’ai rencontré mon père pour la première fois en 2005, lorsque j’avais neuf ans. Il est reparti quelque temps plus tard », précise l’auteur. D’abord pensée comme une thérapie, la série se transforme rapidement en une œuvre universelle, tentant d’interroger les notions d’identité et de relations. « C’est pour cette raison que j’ai choisi de la publier », affirme Simon Lehner.

© Simon Lehner© Simon Lehner

Les souvenirs et fantasmes d’un enfant

C’est à la manière d’un enfant que l’artiste a développé son récit. Une histoire aux frontières de l’imaginaire, empruntant aux passe-temps insouciants de la jeunesse. « Les jeux vidéo font autant partie de l’univers enfantin que des dessins sur une feuille de papier », rappelle l’auteur. Sur les clichés, le garçon symbolise une certaine vulnérabilité, face au temps qui passe comme aux épreuves restant à affronter. La grotte, elle, devient une cachette aussi rude que rassurante. « Elle pourrait également représenter l’amour de ma mère », ajoute-t-il. En réponse à ces mises en scène, quelques dessins numériques recomposent son père. Une manière pour le photographe d’imiter sa présence, en se servant d’anciens portraits de lui pour le faire apparaître sans avoir à le rencontrer de nouveau.

Comme à tâtons, Simon Lehner crée un espace intime, où réel et fiction se mêlent. Un lieu à part, regroupant les souvenirs et fantasmes d’un enfant, mais aussi la maturité d’un homme en proie aux questionnements. « Nous suivons ici l’histoire d’un personnage aux premières lignes d’un combat entre deux armées opposées – le père et la mère », précise-t-il. Face à cette épreuve difficile, le retrait dans un monde chimérique devient finalement l’unique option. Une représentation sensible d’un drame ordinaire.

© Simon Lehner© Simon Lehner
© Simon Lehner© Simon Lehner
© Simon Lehner© Simon Lehner
© Simon Lehner© Simon Lehner
© Simon Lehner© Simon Lehner

© Simon Lehner

Explorez
Rastchoutchas, la pop en béquille
© Rastchoutchas
Rastchoutchas, la pop en béquille
Entre les potes, les ombres et les mâchoires animales qu’une main de matrone serre, Rastchoutchas pope toujours la même et unique soirée...
16 avril 2024   •  
Écrit par Hugo Mangin
Paolo Roversi au Palais Galliera : la mode à la lisière des songes
Guinevere, Yohji Yamamoto, Paris, 2004 © Paolo Roversi
Paolo Roversi au Palais Galliera : la mode à la lisière des songes
En ce moment même, le Palais Galliera se fait le théâtre des silhouettes sibyllines de Paolo Roversi. La rétrospective, la première qu’un...
12 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
100% L'EXPO : immersion magnétique dans l'art émergent
© Daria Svertilova, Maisons éphémères, 2023, ENSAD / Courtesy of 100% L'EXPO
100% L’EXPO : immersion magnétique dans l’art émergent
En accès libre et gratuit, le festival 100% L’EXPO revient pour une 6e édition au sein de la Grande Halle ainsi qu’en plein air dans le...
08 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Tarek Mawad et les mouvements des corps
© Tarek Mawad
Tarek Mawad et les mouvements des corps
À l’instar de ses muses, Tarek Mawad, photographe de mode germano-égyptien, est porté par un mouvement permanent.
05 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
Il y a 9 heures   •  
Écrit par Costanza Spina
Photon Tide, le glitch à l'âme
© Photon Tide
Photon Tide, le glitch à l’âme
« Je voudrais que vous n'ayez pas peur de ce qui se trouve dans votre esprit, mais que vous l'embrassiez », déclare Photon Tide, ou « Pho...
19 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
© Nicolas Jenot
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
Expérimentant avec la photo, la 3D ou même le glitch art, l’artiste Nicolas Jenot imagine la machine – et donc l’appareil photo – comme...
18 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
De la Corée du Nord au fin fond des États-Unis en passant par des espaces imaginaires, des glitchs qui révèlent les tensions au sein d’un...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine