Drôles d’oiseaux

12 février 2020   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Drôles d’oiseaux

À travers Beak, série photographique aux influences picturales, l’artiste française Sophie Alyz aborde, de manière atypique, les enjeux écologiques actuels.

Journaliste culturelle de formation, Sophie Alyz s’est tournée vers la photographie en 2005. « Pour une raison que j’ignore, il m’est devenu très difficile d’écrire, pourtant, j’avais toujours besoin de raconter des histoires. Je baignais dans l’univers culturel, visitais de nombreuses expositions, côtoyais des artistes… C’est donc naturellement que je me suis tournée vers la photo », confie-t-elle. Aujourd’hui professionnelle – formée notamment à la nature morte et au portrait – elle dirige son travail personnel vers l’homme et sa relation à l’environnement. « J’envisage aussi le 8e art comme un objet avec lequel il est permis de jouer : procédés anciens, Polaroids, destruction de tirages, encre, peinture, etc. », précise-t-elle

Un goût pour l’expérimentation que l’on retrouve dans Beak, récit conceptuel et engagé aux accents picturaux. « En descendant d’un train, l’été dernier, en Suisse, j’ai été frappée par le chant des oiseaux qui résonnait partout, couvrait presque le bruit de la circulation. Si je savais déjà qu’ils avaient fui Paris, j’en prenais pour la première fois vraiment conscience », se souvient-elle. Démarre alors une narration faussement candide, représentant ces animaux dans des trains en partance pour la Suisse.

© Sophie Alyz

Une lecture à contre-courant de l’état du monde

« La réalité est, bien sûr, tout autre : d’après la Ligue Protectrice des Oiseaux (LPO) trois moineaux sur quatre ont disparu de Paris en 13 ans, et un tiers des oiseaux, toutes espèces confondues, a disparu des campagnes françaises en 17 ans »,

explique Sophie Alyz. Les causes ? Les pratiques agricoles, l’intensification de l’urbanisation, ou encore la chasse. Pourtant, malgré ces constats alarmants, Beak se lit comme un doux poème aux espèces animales. Une histoire tendre et décalée, abordant, en contrepoint, l’urgence écologique. « J’ai du mal à faire passer un message en “criant”, j’ai toujours l’impression qu’il va rater sa cible », précise la photographe.

Véritables aquarelles, ses images, retravaillées à l’encre ou à la peinture deviennent organiques, comme issues de la nature elle-même. Inspirée notamment par le peintre danois Vilhelm Hammershøi, célèbre pour son refus de se conformer à la modernisation de l’art, l’auteure propose une lecture à contre-courant de l’état du monde. Ses paysages sauvages comme urbains, et portraits lyriques d’espèces d’oiseaux révèlent, élégamment, la richesse de notre planète. Au cœur d’un flux d’images constant et violent, ses créations deviennent des oasis paisibles, alertant néanmoins d’un péril imminent.

© Sophie Alyz

© Sophie Alyz© Sophie Alyz

© Sophie Alyz© Sophie Alyz© Sophie Alyz

© Sophie Alyz© Sophie Alyz

© Sophie Alyz

© Sophie Alyz

Explorez
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
19 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Les éternels éphémères : des abeilles et des hommes
© Maewenn Bourcelot
Les éternels éphémères : des abeilles et des hommes
C’est un monde sublime et violent, enchanté et tragique, énigmatique et d’une évidence terrible. Avec Les Éternels Éphémères, la...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Ces séries photographiques qui apprivoisent la ville
© Craig-Whitehead
Ces séries photographiques qui apprivoisent la ville
Dans la rue, au cœur du fourmillement de la foule ou au fil des bâtiments qui façonnent la réalité urbaine, les photographes n’ont de...
16 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Fotohaus Bordeaux 2024 : appréhender le littoral et ses territoires autrement
© Nancy Jesse
Fotohaus Bordeaux 2024 : appréhender le littoral et ses territoires autrement
En ce mois d’avril, la ville de Bordeaux célèbre le 8e art. Parmi les nombreuses expositions à découvrir figure Fotohaus Bordeaux, qui...
11 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
19 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Photon Tide, le glitch à l'âme
© Photon Tide
Photon Tide, le glitch à l’âme
« Je voudrais que vous n'ayez pas peur de ce qui se trouve dans votre esprit, mais que vous l'embrassiez », déclare Photon Tide, ou « Pho...
19 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
© Nicolas Jenot
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
Expérimentant avec la photo, la 3D ou même le glitch art, l’artiste Nicolas Jenot imagine la machine – et donc l’appareil photo – comme...
18 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
De la Corée du Nord au fin fond des États-Unis en passant par des espaces imaginaires, des glitchs qui révèlent les tensions au sein d’un...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine