Sous le voile

30 juin 2016   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Sous le voile
Yumna Al-Arashi a accepté de nous parler de sa série “Northern Yemen” qui n’avait encore jamais été publiée en France. À travers ses photos, elle nous dévoile un autre visage du Yémen, plaçant les femmes qui portent le voile traditionnel au coeur de son travail.

C’est un propos rare que nous délivre Yumna Al-Arashi, qui considère qu’au Yémen « les femmes qui portent le hijab sont plus libres que les autres ». À 28 ans, la photographe originaire du Yémen, a sillonné pendant deux ans le Nord du pays, de Sanaa (la capitale) à Mahweet. Au centre de ses images, une femme porte fièrement le hijab et souffle le vent de la révolte dans un pays dont on ne parle que « pour évoquer la guerre et la pauvretéalors que toute ma vie, j’y ai vu un territoire vibrant », explique Yumna.

Si la photographe est née et a grandi aux États-Unis où elle vit toujours, son attachement au pays de la Reine de Saba semble dépasser les frontières de sa propre identité. Dans le chaos politique, économique et social, les photos de Yumna révèlent des paysages d’une grande beauté et nous laissent apercevoir une autre culture du féminisme, héritée du printemps arabe de 2011. Elle est pleine d’espoir et de convictions religieuses, bien qu’aujourd’hui, les choses aient un peu changé…

Extrait de "Northern Yemen" © Yumna Al-Arashi
Extrait de “Northern Yemen” © Yumna Al-Arashi
Extrait de "Northern Yemen" © Yumna Al-Arashi
Extrait de “Northern Yemen” © Yumna Al-Arashi

Le hijab comme un bouclier

« Au Yémen, les femmes sont de vrais ninjas sous leurs habits noirs. Elles sont fortes, puissantes, gracieuses et belles, chefs de leurs maisons, de leurs familles et de leurs terres », raconte Yumna Al-Arashi, Pourtant, le Yémen est l’un des pays qui respecte le moins les droits des femmes selon une étude publiée en 2014 sur l’égalité des sexes. Paradoxe ? « Au contraire », nous dit Yumna Al-Arashi, qui poursuit : « Qu’il s’agisse du voile ou du bikini, peu importe leur garde-robe, ce qui définit l’émancipation des femmes, d’où qu’elles viennent, c’est justement l’aspiration à l’égalité des droits dans tous les domaines. Au Yémen cette aspiration est la plus forte que je n’ai jamais vue. »

yumna_al-arashi_northern_yemen_02yumna_al-arashi_northern_yemen_03yumna_al-arashi_northern_yemen_04yumna_al-arashi_northern_yemen_05yumna_al-arashi_northern_yemen_06yumna_al-arashi_northern_yemen_07yumna_al-arashi_northern_yemen_08yumna_al-arashi_northern_yemen_09yumna_al-arashi_northern_yemen_12yumna_al-arashi_northern_yemen_13yumna_al-arashi_northern_yemen_14

Pour la photographe, déjà nommée dans le classement des femmes les plus influentes par le magazine Forbes en 2011, « les gens rejettent souvent l’idée que les femmes musulmanes puissent avoir du pouvoir et une identité simplement parce qu’elles portent le hijab ». Mais Yumna l’assure, « au Yémen, il y a un respect pour elles que nous voyons très rarement dans le monde occidental. Par ce vêtement, elles se mettent à l’abri de tout jugement qui repose sur l’apparence ».

Une autre culture du féminisme

« Je n’ai jamais considéré mon travail comme la continuité d’un autre mais je pense qu’il peut s’inscrire dans une action féministe », nous confie Yumna. Pour elle « le hijab est nécessaire dans certains pays  et il m’a aidé à faire mon travail ». Le tout, pour Yumna c’est que « le féminisme supporte les femmes à tous les égards ». Et c’est peut-être dans sa capacité à saisir, tant par les images que par son propos, ce féminisme à l’orientale, que repose tout le travail de Yumna Al-Arashi.

Propos recueillis par Mélany Marfella

En (sa)voir plus

→ Découvrez l’ensemble du travail de Yumna sur son site : http://www.yumnaaa.com/

→ Suivez-la sur Instagram : @yumnaaa

→ Ou sur Twitter : @yumna

Explorez
Always Here : les errances périphériques de Tom Lewis
© Tom Lewis
Always Here : les errances périphériques de Tom Lewis
Douces errances dans des quartiers périphériques, les photos de Tom Lewis traduisent une quête de sens générationnelle. Always Here, son...
18 mars 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Lorsque la photographie célèbre l'écriture
Bani Murr, Asyut, mars 2016 © Bieke Depoorter/Magnum Photos
Lorsque la photographie célèbre l’écriture
À l’occasion de l’exposition qui se déroule en ce moment à la Maison Européenne de la Photographie sur Annie Ernaux, nous avons...
14 mars 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Les 400 coups, Guatemala et génocide, dans la photothèque de Juan Brenner
© Juan Brenner
Les 400 coups, Guatemala et génocide, dans la photothèque de Juan Brenner
Des premiers émois photographiques aux coups de cœur les plus récents, les auteurices publié·es sur les pages de Fisheye reviennent sur...
13 mars 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Édith Laplane et Michaël Serfaty : exploration du corps féminin
© Édith Laplane
Édith Laplane et Michaël Serfaty : exploration du corps féminin
Édith Laplane et Michaël Serfaty font converger leurs pratiques artistiques dans l’exposition Ni tout à fait la même, ni tout à fait un...
13 mars 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Dans l'œil de Sabatina Leccia : le charme onirique de la nature
© Sabatina Leccia, Traverser la nuit, 2023 / Courtesy of Galerie XII
Dans l’œil de Sabatina Leccia : le charme onirique de la nature
Cette semaine, plongée dans l’œil de Sabatina Leccia, artiste française qui se plaît à expérimenter avec la matière. Pour Fisheye, elle...
18 mars 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Always Here : les errances périphériques de Tom Lewis
© Tom Lewis
Always Here : les errances périphériques de Tom Lewis
Douces errances dans des quartiers périphériques, les photos de Tom Lewis traduisent une quête de sens générationnelle. Always Here, son...
18 mars 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Les coups de cœur #484 : Natalia Jacott et Viviana Bonura
© Natalia Jacott
Les coups de cœur #484 : Natalia Jacott et Viviana Bonura
Natalia Jacott et Viviana Bonura, nos coups de cœur de la semaine, ont en commun la pratique de l’autoportrait. Par ce biais, toutes deux...
18 mars 2024   •  
Les images de la semaine du 11.03.24 au 17.03.24 : les liaisons multiples du 8e art
© Wuchao Feng, Till your tears mixed up with mine (2023) / Off-RCA
Les images de la semaine du 11.03.24 au 17.03.24 : les liaisons multiples du 8e art
C’est l’heure du récap‘ ! Cette semaine, les photographes partagent des approches pluridisciplinaires, explorant des médiums tels que la...
17 mars 2024   •  
Écrit par Milena Ill