Images Vevey, une nouvelle vague d’extravagance

11 septembre 2018   •  
Écrit par Eric Karsenty
Images Vevey, une nouvelle vague d’extravagance

La 6e édition de la biennale des arts visuels vient de s’installer au bord du lac Léman avec plus d’une soixantaine d’installations qui dépoussièrent les traditionnelles expos photo. Le grand rendez-vous suisse de la photographie vous attend jusqu’au 30 septembre : ne le manquez pas !

Images Vevey n’est pas une manifestation photo comparable à celles que l’on peut découvrir de ce côté-ci des Alpes. Ce rendez-vous biennal dont la 6e édition vient de démarrer a de quoi vous surprendre : c’est ce qui fait tout son charme ! On y trouve des travaux de photographes, mais aussi une belle concentration d’artistes de renommée internationale qui malaxent les images, fixes et animées, pour nous amener, souvent avec humour et légèreté, à nous questionner. Comme les images lenticulaires de Philippe Durand qui explorent, au 10 000e de seconde, les figures subliminales révélées par les flammes. Une installation à fleur d’eau du Léman qui résonne avec son titre Feu (au lac). Erik Kessels, lui, investit l’église Sainte-Claire pour déployer une collection de 1 760 vinyles dont les pochettes recouvrent deux immenses cimaises convergeant vers le chœur. Ces 33 tours dédiés aux chants folkloriques – collectés par l’artiste un peu partout dans le monde – sont accompagnés par une bande-son, parfois grinçante, composée par la compilation des enregistrements. Cette immersion visuelle et sonore (montrée ici pour la 1re fois) nous invite à une étrange communion et représente une expérience dans le droit fil de « l’extravagance » sous laquelle est placée cette nouvelle édition.

© Eric Karsenty

Erik Kessels dans l’église Sainte-Claire © Eric Karsenty

Une aventure visuelle et sensorielle

Autre lieu autre ambiance. On plonge dans la cave d’une ancienne droguerie investie par le festival (qui n’a pas de lieux fixes et doit se réinventer tous les deux ans) pour partir à la découverte de l’univers halluciné bricolé par Augustin Rebetez, photographe, et Martin Zimmermann, metteur en scène, clown et chorégraphe (en tournée ici ) . Les Catacombes de Mr. Skeleton est une aventure visuelle et sensorielle à ne pas manquer. On y descend par un escalier qui nous met de suite dans une ambiance burlesque et macabre par des images, des sculptures et des installations qui balancent entre train fantôme et décor à la Tim Burton. Et en s’enfonçant encore d’un niveau, on accède à une salle de projection où on peut visionner une douzaine de courts-métrages en stop motion qui sont une merveille (à voir ici). On trouvera aussi d’autres artistes comme Annette Messager (dessins et photos), Pierrick Sorin (vidéo et hologramme), ou encore Erwin Wurm et son incroyable Narrow House, une sculpture représentant une version compressée de la maison de ses parents. Une installation montrée l’an dernier à la Biennale de Venise qui se déploie sur 16 m de long, 7 m de haut pour seulement 1,38 m de large. Une construction que le spectateur peut visiter, et où le mobilier a subi un étrange rétrécissement figurant le caractère oppressant de l’ancien domicile familial de l’artiste.

© Martin Zimmermann / Augustin Rebetez, 2018

© Martin Zimmermann / Augustin Rebetez, 2018

Erwin Wurm, Narrow House © Eric KarsentyErwin Wurm, Narrow House © Robert Fessler

Erwin Wurm, Narrow House © à g. Eric Karsenty et à d. Robert Fessler

Un vent de fraîcheur et de légèreté

L’extravagance, thème qui donne le ton de cette édition, se décline sur d’immenses images sur bâches géantes – jusqu’à 500 m2, comme pour Arnold Odermatt, policier suisse qui a documenté son quotidien avec humour durant quatre décennies, ou encore Philippe Ramette et Daido Moriyama – mais se niche parfois dans une cabine téléphonique où l’on retrouve la voix de Franck Sinatra, entouré d’images de son carnet d’adresses. On se retrouve un peu plus loin enfermé dans l’ancienne prison de la ville, dont l’une des cellules a été repeinte en rose, pour faire écho aux Pink Cells d’Angélique Stheli, qui tapissent l’intégralité du mur de l’établissement sur cinq niveaux. On ne pourra pas citer les travaux des 58 artistes issus des 19 pays qui constituent cette vague d’extravagance qui déferle la rive nord du Léman, mais on peut vous assurer que vous ne regretterez pas le déplacement. En associant art contemporain, photographie, installation et vidéo, et en portant un soin attentif aux scénographies des œuvres présentées, Stefano Stoll, le directeur de la biennale, fait souffler un vent de fraîcheur et de légèreté sur le monde des images. Une révélation.

Six pages sur Images Vevey à retrouver dans le prochain Fisheye (en kiosque le 15 septembre) !

© Arnold Odermatt

© Arnold Odermatt

© Philippe Ramette, ADAGP, 2018 Courtesy Galerie Xippas© Philippe Ramette, ADAGP, 2018 Courtesy Galerie Xippas

© Philippe Ramette, ADAGP, 2018 Courtesy Galerie Xippas

© Daido Moriyama / Courtesy of Akio Nagasawa Gallery

© Daido Moriyama / Courtesy of Akio Nagasawa Gallery

© Eric Karsenty

Angélique Stehli © Eric Karsenty

Image d’ouverture: Feu (au lac), une installation signée Philippe Durand © Eric Karsenty

Jusqu’au 30 septembre 2018

Extravaganza Festival Images Vevey

www.images.ch

Explorez
La sélection Instagram #451 : la vie simple
© Melissa Alcena / Instagram
La sélection Instagram #451 : la vie simple
De la photographie de paysage à la nature morte en passant par l'autoportrait, notre sélection Instagram de la semaine est une ode...
23 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
19 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Les éternels éphémères : des abeilles et des hommes
© Maewenn Bourcelot
Les éternels éphémères : des abeilles et des hommes
C’est un monde sublime et violent, enchanté et tragique, énigmatique et d’une évidence terrible. Avec Les Éternels Éphémères, la...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Ces séries photographiques qui apprivoisent la ville
© Craig-Whitehead
Ces séries photographiques qui apprivoisent la ville
Dans la rue, au cœur du fourmillement de la foule ou au fil des bâtiments qui façonnent la réalité urbaine, les photographes n’ont de...
16 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Concours #RATPxFisheye : lumière sur les médaillé·es
© Jeanne Pieprzownik
Concours #RATPxFisheye : lumière sur les médaillé·es
Le 3 avril 2024, le jury du concours #RATPxFisheye a désigné ses trois lauréat·es. Guillaume Blot, Jeanne Pieprzownik et Guillaume...
23 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Necromancer : Inuuteq Storch, mage noir au service des mythes groenlandais
© Inuuteq Storch
Necromancer : Inuuteq Storch, mage noir au service des mythes groenlandais
Dans Necromancer, un récit monochrome aux frontières du monde spirituel, Inuuteq Storch illustre les coutumes de ses ancêtres, tout en...
23 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
La sélection Instagram #451 : la vie simple
© Melissa Alcena / Instagram
La sélection Instagram #451 : la vie simple
De la photographie de paysage à la nature morte en passant par l'autoportrait, notre sélection Instagram de la semaine est une ode...
23 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Fièvre : les remous intimes de Lorenzo Castore
© Lorenzo Castore
Fièvre : les remous intimes de Lorenzo Castore
Jusqu’au 11 mai, la galerie parisienne S. accueille le photographe Lorenzo Castore, l’un des pionniers de la nouvelle photographie...
22 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina