Icônes : les images fantasmées : le musée l’Image interroge les représentations

21 mars 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Icônes : les images fantasmées : le musée l’Image interroge les représentations
Cassius Clay (Mohamed Ali) et les Beatles, Miami, février 1964 © TopFoto / Roger-Viollet
Brigitte Bardot, 1967, tirage photographique moderne d’après un ektachrome original, collection ministère de la Culture. Médiathèque du Patrimoine et de la Photographie © ministère de la Culture. Médiathèque du Patrimoine et de la Photographie. Dist. RMN – Grand Palais / Sam Lévin

Jusqu’au 22 septembre 2024, le musée de l’Image d’Épinal accueille Icônes : les images fantasmées. Par le biais d’un parcours historique, l’exposition propose une réflexion sur la place et la portée de telles représentations dans nos sociétés contemporaines. 

Nos imaginaires sont peuplés d’images que la popularité a érigées au rang d’icônes. Si le terme désigne d’abord exclusivement des peintures religieuses, il eut tôt fait de tomber dans le monde profane. Malgré ce changement de paradigme, la notion de guide qui découle de ces figures demeure pérenne tant le singulier récit qu’elles portent en elles, et qui les dépasse, parvient à rassembler des communautés. Jusqu’à l’automne, le musée de l’Image d’Épinal, situé dans les Vosges, présente une exposition autour de cette thématique. Intitulé Icônes : les images fantasmées, l’évènement revient sur les origines chrétiennes du concept avant de retracer son évolution jusqu’à notre époque contemporaine. En contrepoint, elle interroge leur portée et leur devenir dans une société qui ne cesse de se fragmenter davantage. 

Ayrton Senna, Sao Paulo, 2004, tirage jet d’encre © Patrick Gripe / Courtesy Galerie Jean-Denis Walter, Paris
Mustafa Kemal Atatürk, Anonyme, tirage offset moderne d’après une photographie de 1921, collection privée © D.R.

Des références communes

« Devenir une icône demande à s’inscrire dans un temps long, celui des mythes et des légendes. La personnalité, homme ou femme, qui acquiert ce statut est [censée] avoir une destinée hors du commun, à la fois épique et tragique. Son aura magnétique conquiert l’adhésion des foules et s’invite dans leur imaginaire. Peu importe la réalité ! L’icône est une création fictionnelle, une image fabriquée, un fantasme », indique d’emblée le préambule de l’exposition. À compter de l’invention de la photographie, au 19e siècle, l’élaboration et la diffusion des icônes sont rendues plus aisées. Pour nourrir leur propagande, de même que le culte de leur personnalité, des dictateurs comme Staline, Hitler ou Mao se servent notamment du médium en ce sens. Celui-ci participe à la maîtrise recherchée de l’histoire qu’ils désirent mettre en place. 

Plus tard, la mondialisation, au tournant des années 1960, donnera une autre dimension aux images. Devenues marchandises, elles s’intègrent à la culture populaire et s’imposent comme des références communes qui cristallisent les transformations de nos sociétés. Dès les années 1950, Marilyn Monroe incarne un idéal féminin, engendré par l’industrie du cinéma américain, quand Brigitte Bardot représente la Française libre, indépendante et moderne. Les Beatles, quant à eux, mettent à mal les codes établis par les générations précédentes et signent une œuvre universelle. Preuve de leur influence, en dépit du temps qui passe, les contours de chacune et chacun – encore floqués sur des T-shirts, imprimés sur des affiches ou tout autre support – restent connus de toutes et tous. 

Aujourd’hui, le concept d’icône semble s’être pris dans son propre piège. De fait, quoiqu’elle résulte du prolongement de la mondialisation, l’arrivée d’Internet et des réseaux sociaux a autant favorisé la circulation des images que le morcellement des communautés. Ces figures, de plus en plus nombreuses, se distinguent dès lors par leur aspect éphémère et traduisent une fracture culturelle. Ce constat, au cœur de l’exposition du musée de l’Image, invite ainsi à reconsidérer « nos comportements de zappeuses et de zappeurs »

À lire aussi
Si les icônes m'étaient contées
Si les icônes m’étaient contées
Pour l’été, Regardez Voir inaugure un nouveau format, co-produit avec Fisheye. L’émission de France Inter propose une série de podcasts…
12 juillet 2019   •  
Écrit par Julien Hory
Les expositions photo à découvrir ce printemps !
© Paul Wolff, « Femme en maillot de bain avec ombres de plantes », 1932, tirage d’origine, Collection Christian Brandstätter / Courtesy of Pavillon Populaire
Les expositions photo à découvrir ce printemps !
Chaque saison fait fleurir de nouvelles expositions. À cet effet, la rédaction de Fisheye a répertorié toute une déclinaison…
01 mars 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine
Explorez
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
© Hugo Mapelli
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
Parmi les thématiques abordées sur les pages de notre site comme dans celles de notre magazine se trouve la mode. Par l’intermédiaire de...
17 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans l’œil de J.A. Young : l’hydre monstrueuse qui domine les États-Unis
© J.A. Young
Dans l’œil de J.A. Young : l’hydre monstrueuse qui domine les États-Unis
Cette semaine, plongée dans l’œil de J.A. Young. Aussi fasciné·e que terrifié·e par les horreurs que le gouvernement américain dissimule...
15 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les images de la semaine du 08.04.24 au 14.04.24 : du bodybuilding au réalisme magique
© Kin Coedel
Les images de la semaine du 08.04.24 au 14.04.24 : du bodybuilding au réalisme magique
C’est l’heure du récap‘ ! Les photographes de la semaine s'immergent en profondeur dans diverses communautés, avec lesquelles iels...
14 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
PERFORMANCE : des esthétiques du mouvement
© Nestor Benedini
PERFORMANCE : des esthétiques du mouvement
Du 6 avril au 22 septembre, l’exposition PERFORMANCE au MRAC Occitanie fait dialoguer art et sport. L’événement fait partie de...
13 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
19 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Photon Tide, le glitch à l'âme
© Photon Tide
Photon Tide, le glitch à l’âme
« Je voudrais que vous n'ayez pas peur de ce qui se trouve dans votre esprit, mais que vous l'embrassiez », déclare Photon Tide, ou « Pho...
19 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
© Nicolas Jenot
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
Expérimentant avec la photo, la 3D ou même le glitch art, l’artiste Nicolas Jenot imagine la machine – et donc l’appareil photo – comme...
18 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
De la Corée du Nord au fin fond des États-Unis en passant par des espaces imaginaires, des glitchs qui révèlent les tensions au sein d’un...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine