« Une soif incroyable d’autodestruction » 

« Une soif incroyable d’autodestruction » 

Alcool, drogue… bref la fête et l’ivresse. C’est ainsi qu’Arnold Veber décrit la jeunesse russe. Ses sombres images, découvertes au festival Circulation(s), composent un travail poignant, Last Night I’m Done, sur la jeunesse russe contrainte d’oublier…

C’est en camp de vacances qu’Arnold découvre véritablement la photo. « Ma mère m’a donné un appareil photo numérique, un compact, juste avant de partir », se souvient-il. Un objet apparemment social : « je sentais que c’était l seule chose que je pouvais offrir aux autres ». Aujourd’hui, il lui est impensable de raconter des histoires sans son boitier. L’une d’elles, Last Night I’m Done, a été amorcée en 2014, alors qu’il entrait à l’école d’art Rodchenko, en Russie. Là-bas, il documente son environnement, à savoir de jeunes gens livrés à eux-mêmes, le week-end. « Des jeunes qui chaque week-end, buvaient jusqu’à la mort. En face de moi, j’avais des gars intelligents et bien habillés avec une soif incroyable d’autodestruction ». Surpris par ces séances d’autodestruction collectives, il ne cesse de s’interroger. « Pourquoi boivent-ils tant ? Pourquoi se rendent-ils à ces fêtes comme s’ils allaient travailler ? »

Le vide social

Pour réaliser ce travail, Arnold s’est coupé de toutes potentielles sources d’inspiration. « Je ne suis allé à aucune exposition, je n’ai regardé aucun film ou série liés à la jeunesse, je me suis concentrée sur les sujets de mes images et j’ai observé la réalité », la triste réalité marquée par le taux de pauvreté ou de chômage. L’injustice humaine et le vide social, voici ce qui l’a profondément inspiré. Et en Russie, les politiques aiment la mascarade, « ils influencent les jeunes esprits, ils feront tout pour vous distraire et vous éloignez de votre véritable personnalité », confie-t-il. « On dirait que la crise va bientôt prendre fin. Les adhésions pour le club de sport sont de moins en moins chères, les patrons financent les déjeuners de leur employés, et les docteurs exercent dans des hôpitaux privés. J’adore mon monde ». Chaque photo à sa légende gorgée d’ironie. En plus d’être noir, le portrait qu’il dresse de la jeunesse est ici engagé. Ses images crues interpellent et appellent à la vigilance : la réalité est telle est, et l’alcool et autres artifice ne doivent pas être un prétexte pour oublier de penser.

© Arnold Veber© Arnold Veber© Arnold Veber

© Arnold Veber

© Arnold Veber© Arnold Veber© Arnold Veber© Arnold Veber© Arnold Veber

© Arnold Veber

Explorez
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
© Hugo Mapelli
Quand la photographie s’inspire de la mode pour expérimenter
Parmi les thématiques abordées sur les pages de notre site comme dans celles de notre magazine se trouve la mode. Par l’intermédiaire de...
17 avril 2024   •  
Écrit par Apolline Coëffet
Dans l’œil de J.A. Young : l’hydre monstrueuse qui domine les États-Unis
© J.A. Young
Dans l’œil de J.A. Young : l’hydre monstrueuse qui domine les États-Unis
Cette semaine, plongée dans l’œil de J.A. Young. Aussi fasciné·e que terrifié·e par les horreurs que le gouvernement américain dissimule...
15 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Les images de la semaine du 08.04.24 au 14.04.24 : du bodybuilding au réalisme magique
© Kin Coedel
Les images de la semaine du 08.04.24 au 14.04.24 : du bodybuilding au réalisme magique
C’est l’heure du récap‘ ! Les photographes de la semaine s'immergent en profondeur dans diverses communautés, avec lesquelles iels...
14 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
PERFORMANCE : des esthétiques du mouvement
© Nestor Benedini
PERFORMANCE : des esthétiques du mouvement
Du 6 avril au 22 septembre, l’exposition PERFORMANCE au MRAC Occitanie fait dialoguer art et sport. L’événement fait partie de...
13 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Nos derniers articles
Voir tous les articles
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
© Chloé Milos Azzopardi
Ces corps qui nous traversent : réparer notre relation au vivant
Du 6 au 28 avril, Maison Sœur accueille Ces corps qui nous traversent, une exposition qui nous inivite à repenser notre rapport au vivant.
19 avril 2024   •  
Écrit par Costanza Spina
Photon Tide, le glitch à l'âme
© Photon Tide
Photon Tide, le glitch à l’âme
« Je voudrais que vous n'ayez pas peur de ce qui se trouve dans votre esprit, mais que vous l'embrassiez », déclare Photon Tide, ou « Pho...
19 avril 2024   •  
Écrit par Milena Ill
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
© Nicolas Jenot
Nicolas Jenot : le corps des machines et ses imperfections
Expérimentant avec la photo, la 3D ou même le glitch art, l’artiste Nicolas Jenot imagine la machine – et donc l’appareil photo – comme...
18 avril 2024   •  
Écrit par Lou Tsatsas
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
©Théo Saffroy / Courtesy of Point Éphémère
Voyage aux quatre coins du monde : la séance de rattrapage Focus !
De la Corée du Nord au fin fond des États-Unis en passant par des espaces imaginaires, des glitchs qui révèlent les tensions au sein d’un...
18 avril 2024   •  
Écrit par Fisheye Magazine